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La démarche paraît saugrenue : déguster d’anciens millésimes de vins rosés. Comme des grands crus ! Lancée en mars 2021 depuis l’appellation Tavel (Gard), l’Association internationale des rosés de terroir (AIRT) s’est donné pour mission de promouvoir ces « vins de garde » ni rouge, ni blanc. L‘AIRT a validé la création de la première cave au monde dédiée au vieillissement de rosés de terroir. Chaque année, les membres de l’association y déposeront des bouteilles de leur nouveau millésime. Ces rosés, pas forcément clairs, évoluent positivement en vieillissant, ne se consomment pas qu’en été et accompagnent des plats gastronomiques. Nicolas Durif en est fan. Ainsi, le chef étoilé du restaurant l’Hysope, près de La Rochelle, vient-il d’endosser le rôle d’ambassadeur de l’AIRT.
Le 16 janvier 2023, quinze invités triés sur le volet sont venus tester ses accords mets et vins. Ces rosés proposés offraient des arômes et textures aussi inattendus que leur coloration variant de l’orange au rouge clair. Sans être déviants, certains millésimes servis (de 1994 à 2021) avaient considérablement muté. Il faut tout le talent d’un grand chef pour créer des plats en accord avec des cuvées aux goûts si insondables.
Nicolas Durif, d’où vous vient cette passion pour le vin rosé ?
J’ai dans mon souvenir l’image de mon grand-père alsacien qui avait souvent du Tavel à table. Il le sortait dans les grandes occasions. Au fur et à mesure, on s’aperçoit qu’on aime certains rosés et pas d’autres. En ce qui me concerne, je ne suis pas porté sur les rosés clairs… À un moment, j’ai décidé de militer pour avoir du vrai rosé qui reflète une véritable appellation. Car le rosé est un vin à part entière. Ce n’est pas que pour juillet et août ! Par exemple, je suis un grand amateur du Tavel. Là-bas, il y a des gens qui sortent des vins formidables ; par exemple un Tavel de 2011 qui a treize ans, c’est formidable. Ces rosés de garde et de terroir ont leur place chez les bons cavistes et sur les bonnes tables des restaurants.
On vous prête une grande connaissance des rosés…
Mon éventail est assez large, j’explore constamment. C’est devenu une passion. Je me suis dit : « Pourquoi crée-t-on des accords avec le blanc, le rouge et différents alcools, alors que personne ne crée d’accords avec le rosé » ; moi, je n’en ai jamais vu.
Les chefs ne jouent-ils pas la prudence en privilégiant systématiquement le blanc et le rouge ?
Nous sommes là pour prendre des risques, pour bousculer les codes. C’est pour cela que l’on doit être ambassadeur de certaines cuvées et domaines. Pour l’instant il n’y a pas de codes. Il faut écrire sur une page blanche. Et donner toutes ses notes de noblesse aux rosés, de saignée ou de garde, qui ont leur place dans la gastronomie. Seulement, il faut oser. C’est un budget de mettre un rosé de 2010 ou 1994 sur table.
Pour le consommateur, le rosé n’est pas synonyme de grande cuisine…
J’aurai pu vous servir le combo gagnant : paella et rosé ! Ce serait facile. Manger un foie poêlé qui est gras avec une anguille fumée sur un rosé, ça c’est autre chose. Je recommande à chacun de faire le test : achetez une bouteille de rosé à 15 euros, oubliez-la dans la cave et ouvrez-la trois ans après. On voit bien la différence d’évolution.
Vous mettez en avant les « rosés de terroirs ». Comment les définir ?
On a tout à faire. C’est aussi aux vignerons de travailler leur vin pour que certains deviennent des rosés de terroir qui puisse se garder cinq à vingt ans. Travaillez vos rosés comme votre blanc et rouge, mettez-y du cœur ! J’ai goûté un 1976 ; c’est sûr que ce n’est plus vraiment un rosé. Mais si on fait abstraction de ça, on se dit que c’est un grand vin. De fait, il est gastronomique.
Quel accord, que vous avez créé avec un rosé, vous a le plus enthousiasmé ?
Un dessert chocolat, œuf de poisson avec des algues accompagné du rosé de 1994… qui n’a plus le goût de rosé. Il a muté, on est sur un vermouth sec ! Le problème c’est que les clients risquent de nous reprocher de ne pas servir un « vrai rosé ».
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