Château Cheval Blanc
– (c) Eric Chol
Sur l’un des piquets de bois bordant les 53 parcelles du domaine Cheval Blanc, on peut lire “9A-Cabernet franc 1930”. Mais l’histoire du terroir est beaucoup plus ancienne : dès le XIVe siècle, des vignerons y étaient installés. Produisant un vin d’exception, premier grand cru classé A, Château Cheval Blanc a marqué les esprits l’an dernier en annonçant quitter le prestigieux classement de Saint-Emilion, pour cause de désaccord avec ses critères d’évaluation. Un coup de tonnerre dans le petit monde bordelais.
C’est une autre révolution qui est à l’oeuvre depuis deux ans dans la propriété de Bernard Arnault et de la famille du Belge Albert Frère. Fini, le régime de la monoculture : désormais, on plante des arbres fruitiers ou forestiers qui côtoient les ceps de vigne, séparés par des inter-rangs où poussent seigle, lin, moutarde ou radis… La moitié des 39 hectares a déjà été transformée, avec 3 500 arbres plantés. Brebis, poulardes et cochons en sont les nouveaux résidents. “Plus on développera la diversité, et plus on pourra lutter contre les maladies et les parasites”, insiste Pierre-Olivier Clouet, directeur technique du domaine.
Des indicateurs permettent de suivre scientifiquement les premiers effets de la métamorphose. Déjà, les eaux de pluie pénètrent mieux dans les sols et la faune revient en force : des lièvres, mais aussi des mésanges ou des chauves-souris, qui vont se régaler avec les vers de la grappe, ennemis des vignerons. “Nous sommes devenus des producteurs de biodiversité”, résume Pierre-Olivier Clouet. “On fait du grand vin parce qu’on dispose de grands terroirs : Cheval doit absolument rester Cheval !”, déclare Pierre Lurton, l’administrateur des lieux. Ce basculement vers un nouveau mode de viticulture n’a cependant rien d’une lubie passagère. “Ce qui se passe est aussi important que la plantation du cabernet franc en 1832 ou la création du chai de Portzamparc en 2011”, assure Pierre- Olivier Clouet. Car si rien n’était fait, la vigne risquerait de subir l’impact du réchauffement climatique et le vin de perdre son élégance pour prendre des accents sudistes. Ainsi, comme l’assure le directeur technique, “on change tout pour que rien ne change”.
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Château Cheval Blanc, producteur de biodiversité – L'Express
février 19, 2025 2 Mins Read
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