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C’est la sempiternelle question à l’approche des fêtes : l’accord est-il pertinent ? Ou doit-on, au contraire, sortir des sentiers battus ?
par Fabrizio Bucella*
Temps de lecture : 3 min
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Hegel, déjà à son époque, regrettait la non-extravagance : elle devenait si rare. S’il est un domaine où se professe ladite extravagance sans s’appliquer, c’est bien celui du vin. La viande ? Dame, avec du rouge ! Le poisson ? Fichtre, avec du blanc ! Le dessert ? Stop, on est fatigués.
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Patatras. Que fait-on du fameux sauternes, la bouteille tapie au fond de la cave ? Parlant de caves, lesdites de Sauternes regorgent de quilles. Il paraît qu’elles ne se vendent plus guère. Pourtant, quand on ouvre ces flacons, on s’extasie : on regrette d’avoir tant attendu pour s’offrir le divin nectar.
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Le sauternes nous donne tout, et le reste aussi : plaisir des yeux et plaisir du nez. La vue se rapporte au crâne et au cerveau, proposait Alain. À l’inverse, le nez, c’est viscères et compagnie, le plaisir animalesque : « Juger de la chose d’après l’odeur, c’est directement la juger agréable. »
Le sauternes est le seul vin à réaliser immédiatement ces deux opérations : charmer tant le bide (odorat) que le ciboulot (vue). Le premier serait notre deuxième cabèche. Réfléchir avec son ventre, c’est donc réfléchir deux fois. Je mange, donc je double-cogite.
Récemment, on m’a interrogé sur le sempiternel accord foie gras sauternes. Quid et requid… ? Laissons tomber l’accord. Il faut manger le foie gras toute l’année et boire le sauternes chaque semaine. Jamais ensemble. Ledit accord est quand même lourd, pâteux, fatigant. On renforce la douceur de l’un avec le sucre de l’autre. Rien d’extravagant.
Qu’on fût extravagant, on essayerait le sauternes sur des ris de veau, des vol-au-vent, voire des moules, oui des moules, et bien entendu le plateau de fruits de mer. On assaisonnerait les endives avec des noix et du roquefort et bardaf, on sortirait le sauternes. Une raclette ? Le sauternes ! Une fondue ? De même. Un plateau de fromages ? Itou.
Tout ceci est bien joli, mais on tourne autour du pot, sans nous dire avec quoi on va l’accompagner, notre pot de foie gras.
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Tout est écrit dans Mon cours d’accords mets et vins (Dunod, 2019). Foin de finasseries, dévoilons l’astuce. Que boire ? Tout ! Tout ? Tout ce que vous voulez. L’astuce : rincez-vous la bouche avec un peu d’eau, grignotez du pain croustillant, seul. Vos muqueuses buccales ainsi fringantes, faites-vous plaisir : rouge ou blanc, peu me chaut, tout ira bien.
Que vous fussiez décadent, du genre qui décade longtemps, extravagant, hégélien, iconoclaste, sortez des sentiers battus ! Sinon vous êtes un imposteur et sortez tout court. Avec le foie gras, on sortira la gnôle, la vraie. On s’empiffre de foie gras à s’en faire péter le bide, on rince les bajoues à la vodka. On sirote un whisky délicatement tourbé. C’est le nirvana du gosier, la jouissance du bide, Austerlitz dans la cafetière. (Rappel : je mange, donc je cogite deux fois.)
À Découvrir Le Kangourou du jour RépondreCette opération rondement menée, il ne vous aura pas échappé qu’incidemment a été sauvée la bouteille dudit sauternes. Quand l’ouvre-t-on ? Mais tout de suite, parbleu ! À l’attaque, que diable. Il n’est point d’autre plaisir que celui que l’on se donne. En avant, moussaillon. Le reste du repas attendra.
*Le Pr Fabrizio Bucella est physicien, docteur en sciences, il enseigne à l’Université libre de Bruxelles. Sommelier et zythologue (spécialiste de la bière), il dirige l’école d’œnologie Inter Wine & Dine. Il professe également dans les masters 2 du droit de la vigne et du vin de l’université de Bordeaux et du droit du vin et des spiritueux de l’université de Reims-Champagne-Ardenne. Il est l’auteur de nombreux ouvrages sur le vin et nous donne régulièrement rendez-vous au travers de sa rubrique, Le prof en liberté.
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Jurançon !
À mon goût
foie gras : rouge tannique plutôt cabernet franc avec une pointe d’acidité
Sauternes : 11h00 avec rien !
Ne pas confondre un sauternes et un pâle tokay.
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