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Par Karine Poulard – Bretagne Magazine
Au domaine du Poulhors, à Sarzeau, un couple de Champenois s’est lancé dans l’aventure du vin. Ils ont planté 25 000 pieds de chardonnay, chenin et cabernet franc. Leur objectif ? Produire des vins effervescents, des blancs à boire à l’apéro ou en accompagnement d’huîtres et de poissons, et un peu de rouge et de rosé.
Depuis Penvins, une route bucolique et boisée, toute en courbes douces, mène au site du Poulhors encore vierge de signalétique. Au pied d’un vieux moulin, boutons d’or, genêts et marguerites sauvages donnent un charme délicat à ce lieu longtemps délaissé. Mais là n’est pas son seul intérêt.
Depuis mai 2020, après une dizaine d’années de recherche des meilleures parcelles et d’expertises des sols et des sous-sols, ce petit bout de terre planté sur un point haut de Sarzeau est le théâtre du retour de la vigne sur la presqu’île de Rhuys. « Les dernières vendanges ont eu lieu ici même en 1992 », explique Guillaume Hagnier, le vigneron qui œuvre à leur renaissance avec sa compagne si bien nommée, Marie Devigne.
Initié et en partie financé par la municipalité sarzeautine, ce projet ne laisse rien au hasard et s’appuie sur la longue tradition viticole de la région. À la fin du 19e siècle, le vignoble s’étendait sur plus de 2 000 hectares, jusqu’à Vannes, avant de disparaître sous l’effet du phylloxéra, des guerres, des primes à l’arrachage et des cépages médiocres, comme le noah à la folle réputation.
En 2016, la libéralisation des droits de plantation – conséquence du réchauffement climatique – a rendu possible ce retour de la vigne en Bretagne. Aux quatre coins de la région, plusieurs installations ont ainsi vu le jour, portées par une quinzaine de pionniers, tous professionnels. Pour partager leurs pratiques, ils se sont même réunis au sein de l’Association des vignerons bretons (AVB) créée en novembre 2021. « Nous sommes tous en bio et nous devons respecter certaines clauses environnementales, mais chacun guide sa vigne comme il le souhaite », ajoute Marie.
À Sarzeau, le couple bénéficie d’un bail de trente ans et d’une parcelle de 5,5 ha plantée de 25 000 pieds de chardonnay, chenin et cabernet franc. En 2024, de nouvelles plantations porteront la superficie totale du vignoble de Rhuys à 10 ha.
L’Université de Rennes, qui étudie les conditions d’un retour de la vigne en Bretagne, a d’ailleurs équipé le site d’une station météo. Que les esprits chagrins se rassurent : la presqu’île dispose de la même pluviométrie qu’à Lyon et c’est assez faible ! « Il pleut deux fois moins qu’à Vannes. On bénéficie d’un microclimat ici », assure Marie qui se régale de cette nouvelle vie en plein air.
Originaires d’une petite ville près de Reims, les néovignerons bretons se sont installés en presqu’île avec l’envie de vivre au bord de la mer. « En venant ici, jamais nous n’aurions imaginé que Guillaume pourrait à nouveau travailler dans le vin. Mais plus on voyait le projet se monter et plus on se disait que c’était pour nous. Par chance, les personnes qui avaient été retenues par la mairie se sont désistées », s’amuse Marie, employée au service urbanisme de la mairie de Saint-Gildas-de-Rhuys et qui apprend la conduite de la vigne auprès de son expérimenté compagnon.
Ancien ouvrier viticole, puis cuviste dans la réputée Côte des Blancs, Guillaume a côtoyé ce qui se fait de mieux en Champagne. L’assemblage des cépages, la méthode champenoise, la vinification et la mise en bouteille, il connaît ! Même si…
« Tout est différent, jusqu’au système de palissage, explique-t-il. Nous sommes aussi libérés des réglementations trop strictes, car notre vin sera sans indication géographique. Nous faisons nos propres choix, mais les premières années, nous sommes entre l’essai et la prudence. »
Côté cépages, le couple a fait le choix de planter 50 % de chardonnay, 30 % de cabernet franc et 20 % de chenin afin de produire des vins effervescents, des blancs à boire à l’apéro ou en accompagnement d’huîtres et de poissons, et un peu de rouge et de rosé. Leur choix a été guidé par leurs goûts personnels mais aussi par la structure du sol – mélange de limon, sable et argile sur un sous-sol de micaschiste et sable – et la latitude. La presqu’île est en effet alignée sur l’Anjou, la Bourgogne et l’Alsace qui cultivent traditionnellement ces trois cépages.
En cette mi-mai, les deux vignerons, dos courbés et mains gantées, arrachent en silence et à bon rythme les branches les plus basses de leurs pieds de cabernet franc. Malgré la beauté du site et l’intérêt qu’ils portent au projet, en auraient-ils déjà assez de ce travail très physique ? Pas vraiment…
« On choisit les meilleurs bois, ceux qui porteront les raisins, en retirant les bourgeons et rameaux superflus, on appelle cela l’ébourgeonnage. On prépare les pieds pour l’année prochaine », précise Guillaume. La vigne est en effet affaire de patience. Après deux années à choisir avec soin les porte-greffes et les cépages, puis à planter, palisser, tailler, ébourgeonner, effeuiller et désherber, le temps des premières vendanges – manuelles – ne viendra qu’en 2023.
« Il y a énormément de travail en amont dans les vignes, il faut aussi trouver le nom du vignoble et des cuvées, choisir les étiquettes des futures bouteilles, acheter le matériel de vinification et réfléchir à la commercialisation », ajoute Marie. En septembre, Guillaume mènera un test grandeur nature en vendangeant une partie de ses vignes pour être fin prêt l’année prochaine !
« Nous aurons un vin d’entrée de gamme et un autre plus travaillé en monocépage pour commencer. Nous espérons produire 30 000 bouteilles à partir des 25 000 premiers pieds. Tout est en œuvre pour que la qualité soit au rendez-vous, mais nous ne savons pas précisément quel goût aura notre vin ! », précise-t-il.
Un bon vin est toutefois toujours issu d’un bon raisin… À terme, les grappes seront pressées sur le site même du Poulhors, afin d’éviter le transport et les manipulations susceptibles de les abîmer. Le vin y sera vendu également ! Cet automne, des travaux vont en effet être engagés pour construire le hangar et les chais autour du moulin, dans un bâtiment circulaire et semi-enterré. « Les visiteurs pourront apercevoir les cuves et le pressoir. Une vinothèque, un espace de dégustation et un espace muséographique seront également aménagés », explique Marie. Toujours dans cet esprit de pédagogie, les vignerons planteront quelques ceps francs de pieds, non greffés, autour du moulin. « On ne pourra pas s’ennuyer ! »
Cet article est paru dans le Bretagne Magazine n°127 (septembre-octobre 2022)
Découvrez l’univers du photographe Emmanuel Berthier
Découverte insolite au vignoble de Rhuys à Sarzeau
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